Musset
la Comédie-Française
présente
Salle Richelieu en alternance du 18 septembre 2008 au 15 mars 2009
Fantasio
Pièce en deux actes d’Alfred de Musset
mise en scène de Denis Podalydès
Avec
Claude Mathieu, Facio et la Gouvernanted’Elsbeth, Épilogue
Cécile Brune, Fantasio
Christian Blanc, le Roi de Bavière, un ami de Fantasio et le Tailleur
Florence Viala, Elsbeth
Guillaume Gallienne, Hartman et le Prince de Mantoue
Clément Hervieu-Léger, Prologue, Spark et le Page
Adrien Gamba-Gontard, Prologue, Marinoni
Assistante à la mise en scène, Alison Hornus
Dramaturge, Emmanuel Bourdieu
Décor, Éric Ruf
Assistante pour le décor, Dominique Schmitt
Costumes, Christian Lacroix
Lumières, Stéphanie Daniel
Bande son, Bernard Vallery
Conseil chorégraphique, Cécile Bon
Maquillages, Véronique Nguyen
Musique originale, Grégoire Hetzel
Nouvelle mise en scène
La comédie en deux actes parut pour la première fois dans la « Revue des Deux Mondes » du 1er janvier 1834, mais ne fut pas représentée avant le 18 août 1866, neuf ans après la mort de son auteur. Au fond, l’intrigue ne présente pas un grand intérêt. Fantasio, « plein de sève et de jeunesse », sans état ni profession, désireux d’aimer sans croire à l’amour, de voir le diable sans croire à l’enfer, et, pourquoi pas, « de prendre la lune avec les dents », s’introduit à la cour du Roi de Bavière. Il succède au bouffon du Roi récemment décédé, Saint-Jean, pour échapper à ses créanciers et assister « de la loge du roi lui-même » au mariage de la jeune Princesse Elsbeth, « fantasque comme une bergeronnette », avec le Prince de Mantoue, « sot » et repoussant. Le mariage garantirait la paix au royaume. Dès qu’il comprend qu’il s’agit d’un sacrifice, une « boucherie », Fantasio rompt toute possibilité d’alliance entre les deux pays : il provoque un incident diplomatique, une blague de potache qui le mènera en prison et condamnera le peuple à la guerre. Mais la Princesse, reconnaissante, le libère et lui propose de rembourser ses dettes.
Le cadre se situe à Munich mais les allusions à Louis-Philippe, « le roi-bourgeois », et à la princesse Louise de France, sa fille, qui avait sacrifié ses sentiments à la raison d’Etat pour épouser le 9 août 1832 le roi Léopold 1er de Belgique, font qu’on pourrait bien être à Paris, ou ailleurs. Au XIXe ou aujourd’hui.
Car ce qui compte, ce n’est pas tant l’intrigue et son inscription dans l’espace et le temps que l’atmosphère qui anime la pièce, une rêverie mélancolique d’un monde où l’on croirait encore à la beauté, à l’amour, au bonheur, dans une société désenchantée, embourgeoisée, fragile. Avec cet humour léger, tendre, parfois burlesque, qui lui est propre, Musset tente de rendre compte du piège que constitue la vie en société. S’il s’inscrit dans ce système, s’il donne prise au jeu social, l’homme se perd car il ne peut en maîtriser les règles, elles existent en dehors de lui : l’échange des habits du Prince de Mantoue avec Marinoni, son aide de camp, introduit un doute sur leur fonction, sur leur identité, et constitue un piège dont ils sont eux-mêmes victimes. Fantasio s’est affranchi de ces règles-là, pour ne reconnaître de valeur qu’aux « replis », « compartiments secrets », et « solitudes » de « toutes ces machines isolées », et aux efforts de chacun pour faire vivre le « monde ignoré » qu’il constitue.
Le Phantasio de Podalydès…
Denis Podalydès rend compte de cette complexité en choisissant de confier à une femme le rôle de Fantasio (originellement orthographié « Phantasio »), un Chérubin, mi-ange, mi-démon. Ce choix souligne le caractère ambigu, imaginaire, du personnage et ôte toute évidence à la nature des sentiments qu’il peut inspirer à son entourage, et au public. Cécile Brune est remarquable dans ce rôle périlleux. Elle a le charme mutin de la Gelsomina de « La Strada », incarnée par Giulietta Masina, et une autorité de tragédienne. Guillaume Gallienne souligne avec finesse le caractère grotesque du Prince de Mantoue et Florence Viala donne beaucoup de piquant au personnage romanesque d’Elsbeth.
Le décor d’Eric Ruf, les lumières de Stéphanie Daniel et les costumes de Christian Lacroix participent heureusement à la poésie du texte de Musset : cette scène circulaire, entourée de mats aux voiles trouées, élimées, d’où partent quatre passerelles, ne débouchant sur rien de visible, peut évoquer la cage dans laquelle se débattent les personnages, le manège de leurs imaginaires délirants, mais aussi la croisée des chemins des possibles de leurs destins, que la rose des vents, au centre de la scène, ne saurait orienter. La musique, dans un emploi cinématographique, très présente, ne se justifie pas toujours. Il n’en reste pas moins que cette mise en scène de Denis Podalydès éclaire d’une façon originale et convaincante cette belle pièce de Musset.
(CultureCie.com)
Cécile Brune
Mon avis : Jolis décors et costumes. Acteurs excellents comme toujours à la Comédie Française. Mais... manque de magie, d'envolée... J'ai préféré le Fantasio du Ranelagh.